Eugène Marsan, Italie méridionale, in Le Visage de l’Italie, Paris, Horizons de France, 1929, p. 276-278 : Imaginez une ville dont les églises et les palais seraient tous voués aux volutes et aux dentelles de ce style baroque, extension fantasque, emmêlement de l’esprit classique soudain enivré. Vous avez pu rêver d’une telle ville. Or, elle existe au monde et se nomme Lecce.
Ces statues emphatiques juchées sur la balustrade à l’entrée de la place ; ces grilles que chacune des portes ouvertes sur la rue possède et entretient ; cette blancheur de toutes les choses, cette propreté de la dalle et des murs.
Le cadre d’une vie courtoise, policée, signorile. Vous attendez qu’au coin de cette rue tourne le carrosse du prince. « Florence des Pouilles » : par une sorte de miracle, dans ces contrées de langage mêlé et corrompu ‒ la seule Tarente a trois dialectes, un par quartier ‒ on parle ici un italien incroyablement pur « Athènes des Pouilles » : ceux que vous écouterez au café auront un tour d’esprit mondain et philosophique.
Il faut venir à Lecce pour voir les vieillards hospitalisés d’un dans les deux puits de verdure d’un palazzo fait pour on ne sait quel roi galant et humaniste. Il va paraître en personne et vous offrir du tabac d’Espagne.